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Un dîner avec David
Par Elna Nykänen Andersson
David Enmark se tient debout dans sa cuisine extérieure et aligne les oignons blanchis sur le barbecue avec précision et une énergie contagieuse. L'été s'éloigne lentement dans l'archipel de Stockholm, mais son jardin sur l'île de Tranholmen est encore luxuriant et vert. Les pommes pendent bas sur les arbres, attendant d'être cueillies.
« L'été a été fantastique, mais l'hiver a aussi ses avantages. » Bientôt, le pont qui nous relie au continent sera remis en place, ce qui nous simplifiera la vie », dit-il en retournant les oignons avant qu'ils ne noircissent.
David, son épouse Katarina et leurs deux enfants Anton et Emma, tous deux adultes maintenant, vivent sur cette petite île à deux pas du continent depuis 15 ans. Même si David attend avec impatience le pont saisonnier, il chérit la vie sur l'île. Une vie qui sort de l'ordinaire à bien des égards. L'existence très animée qu'ils avaient auparavant dans la ville n'est plus qu'un lointain souvenir.
« Nous avons vu une annonce dans le journal au sujet d'une maison en vente et nous sommes allés la voir. Après avoir passé cinq minutes ici, nous étions conquis. Principalement à cause du calme », dit-il.
Depuis, ils aiment de plus en plus l'île. Tranholmen compte un peu plus de 400 résidents, dont beaucoup se connaissent et aiment passer du temps ensemble quand ils reviennent de leur travail sur le continent. Les voisins s'entraident au quotidien, par exemple en amenant des amis ou des invités de la terre ferme.
De saison et durable
Pour David, chef cuisinier de formation, l'île n'est pas seulement sa maison. C'est aussi son lieu de travail. La maison familiale, située à quelques minutes à pied de l'embarcadère, près d'une pépinière et d'un court de tennis, fait également office de restaurant judicieusement baptisé David at Home.
« Nous gérons un restaurant ici quelques soirs par semaine », explique-t-il, et ouvre les portes de la cuisine et du salon de la famille. « Nous accueillons une quarantaine d'invités tous les vendredis à 18 h et nous essayons de fermer à 22 h, ce qui fonctionne généralement bien, car c'est à ce moment que part le dernier bateau. »
Lorsque David et son épouse Katarina, qui travaille comme fleuriste à Stockholm, ont décidé d'ouvrir le restaurant, les gens avaient des doutes sur leur réussite. Et comment les enfants
allaient-ils réagir ? La fille de David, Emma, qui ne vit plus avec ses parents mais qui leur rend visite aujourd’hui, s'y est rapidement habituée et a trouvé le cadre du restaurant inspirant.
« Quand nous étions petits, papa nous demandait de l'aide avant l'arrivée des clients, pour plier les serviettes par exemple. Aujourd'hui, je travaille comme sommelière », dit-elle.
Dans un instant, David saluera les convives du jour, qui se verront servir du cerf suédois accompagné de purée de pommes de terre, d’airelles sucrées, d’oignons blanchis et grillés, de champignons et de chou noir. Mais avant, il y a encore beaucoup à faire. Sa femme et ses enfants l'aident parfois, mais la partie cuisine est en quelque sorte son one-man-show. Avec ses capacités multi-tâches qui font rêver la plupart d’entre nous, David jette les airelles dans le sucre (« toujours bio »), enfourne le chou noir glacé au miel (« ma femme dit qu’il faut des légumes verts dans l'assiette ») et partage ses réflexions sur l'alimentation.
« Ma philosophie est basée sur les saisons. Vivant en Suède, je ne pense pas que vous devriez servir une tomate en janvier. C'est la raison pour laquelle je cuisine avec des champignons, des airelles, du poisson et du gibier à cette période de l'année. Les légumes-racines fonctionnent aussi, surtout si vous les faites mariner »
« Il est également important de ne pas jeter de nourriture. Le gaspillage alimentaire, c’est le plus gros problème actuel. Dans mon restaurant, ce problème n'existe pas, parce que je sais combien de personnes seront présentes chaque soir. »
« On récolte ce que l’on sème »
David met un disque sur sa platine vinyle et Sweet Song d'Al Green emplit le salon, meublé dans un style scandinave épuré avec des chaises et des tables en bois et une cheminée en béton. Les invités commencent à arriver et David les conduit à leurs places. Tandis que ces derniers dégustent leur apéritif, il présente le menu, recommande des vins assortis et explique comment tout fonctionne : chaque table dispose d’un morceau de papier, que les clients utilisent pour noter leur consommation de vin et payer en conséquence à la fin de la soirée.
« Les clients que nous accueillons sont honnêtes. Et je suis le genre de personne qui fait confiance aux autres », dit-il en se souvenant qu'un groupe de clients a volé l'elfe de jardin rouge qui accueille les invités dans la salle. « Quelques jours plus tard, ils ont pagayé jusqu’ici pour le rendre. C'est ce que j’entends par honnêteté ; vous récoltez ce que vous semez. »
Au fil de la soirée, l’ambiance chez David at Home ressemble plus à un dîner convivial chez des amis qu'à une soirée au restaurant. Quand il est temps de partir, beaucoup d'invités se dirigent vers la jetée l’air rêveur, se demandant si eux aussi pourraient un jour vivre dans l'archipel.
« Nous n’envisageons pas de retourner vivre en ville. Mais avoir un pied sur les deux rives, c'est le rêve », dit David.
Heureusement, vivre si près du continent facilite la vie de la famille. David a un conseil pour tous ceux qui visitent Stockholm et qui veulent voir l'archipel (sans s'y installer).
« Louez un bateau avec un guide et naviguez autour des îles dans la ville ou prenez les ferries plus loin. Et n'oubliez pas de passer au restaurant au Transtigen 14. »